Historique de la Commune de Frisange
Situé à l’extrême sud du Luxembourg, à la frontière avec la Lorraine, le territoire actuel de la commune de Frisange est habité depuis la nuit des temps. Ainsi on a découvert une multitude de témoins d’époque, comme des racloirs en quartzites et points de flèches datant de l’âge de la pierre, des fosses métallurgiques des âges du bronze et du fer, des poteries carolingiennes ou encore des vestiges de canalisation et de villas gallo-romaines. La plus grande trouvaille archéologique reste cependant le fameux casque-visière, découvert lors de travaux de déboisement autour de Hellange en 1853. Ce casque-visière, provenant d’une sépulture romaine datant du 1er siècle, est un des seulement 32 exemplaires connus de cette époque. Il se détache des ces derniers par sa qualité artistique exceptionnelle et son mode de fabrication. En effet, il a été coulé d’une traite, alors que les autres exemplaires ont été moulés à froid.
Le premier document officiel où apparaît le nom de Frisange date de 771. Ce document mentionne un certain Bertram qui offre les biens qu’il possède à Frisange et Hellange à l’abbaye d’Echternach. Cette donation signale que Frisange était une bourgade d’une certaine importance dès l’époque carolingienne. Au cours du 9ième et 10ième siècle, le monastère d’Echternach perd progressivement ses biens. En 963, l’épouse du comte Gozlin et belle-sœur du comte Siegfrid, la comtesse Uda, lègue son patrimoine de Frisange à l’abbaye St. Maximin de Trêves. L’abbaye tréviroise restait alors seigneur foncier à travers tout le Moyen Age.
A Hellange, localité documentée en temps médiévaux sous l’orthographe « Heldange » (771), apparaît dès 1284 une famille seigneuriale du même nom, alors qu’à partir du 15ième siècle les Clervaux, puis d’autres, s’y installent.
Le village d’Aspelt, cité pour la première fois en 963 sous le nom de « Hadespelth », est historiquement marqué par l’illustre Prince-Evêque Pierre d’Aspelt, dit « Péiter vun Uespelt » (ca 1253 – 1320). Ce fils d’un fonctionnaire au service de l’abbaye St. Maximin de Trêves, étudiait le droit, la théologie et la médecine d’abord à Trêves, puis Bologna, Padua et Paris avant d’entamer une carrière politique et ecclésiastique fulgurante. Au cours de sa vie, Pierre d’Aspelt était l’instigateur du couronnement de pas moins de trois rois : Henry VII, Jean l’Aveugle et Louis de Bavière ; d’où son surnom de « faiseur de rois ».
Jusqu’en 1509, la localité de Frisange appartenait aux seigneurs d’Aspelt, dont l’ancêtre Gérard d’Aspelt était ministre religieux à Aspelt au 12ième siècle. Jusqu’en 1803, la paroisse de Frisange englobe les églises d’Aspelt, d’Evrange, de Hagen et de Hellange. Aspelt et Hellange devenaient des paroisses indépendantes en cette année. L’église de Frisange est consacrée à Saint-Martin, patron national des Francs. Il semble cependant que d’autres saints aient été vénérés aux cours des siècles. La vénération de Saint-Sébastien indique que la région a eu à souffrir des terribles épidémies de peste du 16ième siècle.
Lorsque Louis XIV attaquait la forteresse de Luxembourg en 1683, des combats préliminaires se sont déroulés dans les environs de Frisange. Une fosse commune creusée au cimetière de Frisange durant les premiers jours de l’attaque témoigne de ces déboires.
La révolution française de 1789 ne se limitait pas au territoire français. En effet, jusqu’à fin novembre 1792, des troupes révolutionnaires avaient pénétré 4 fois au village de Frisange. La plus impressionnante des attaques allait se passer aux petites heures du 29 novembre 1793. Environ 400 combattants républicains attaquaient Frisange, défendu par seulement 17 soldats épaulés par une dizaine d’habitants armés. Les défenseurs tenaient vaillamment leurs positions jusqu’à l’arrivée de 20 cavaliers des régiments de l’archiduc Joseph. Renforcés, les défenseurs effectuaient une sortie et battaient les assaillants en retraite. Etonnamment les pertes des défenseurs se limitaient à deux soldats issus des régiments de l’archiduc. Ces soldats ont été inhumés au cimetière de Frisange le jour même de la bataille par le prêtre Collignon.
Le 31 août 1795, après la capitulation de la forteresse de Luxembourg, les conquérants français annexaient le Luxembourg et entreprenaient une réorganisation des structures féodales. L’agence de Frisange, située dans le canton de Hesperange, lui-même situé dans le département des forêts, regroupait les sections d’Aspelt, Frisange, Hellange, Hagen et Evrange. Jakop Kayl devint le premier agent municipal de Frisange, suivi par Jacques Stroup, originaire de Hellange. En 1799 Napoléon Bonaparte prenait le pouvoir en France et centralisait l’appareil administratif. Il créait alors la structure de communes, cantons et districts telle que nous la connaissons aujourd’hui. Lors de la réorganisation territoriale du 28 mars 1820, suite au traité de Vienne (1815) et sous Wilhelm I, les sections de Hagen et d’Evrange sont retournées à la France. Depuis ce jour, la commune de Frisange a plus ou moins gardé ses limites territoriales.
Frisange gagnait en renommée à travers l’établissement d’un relais postal par les Tour et Taxis en 1692, sous le règne de Karl VI (1685 – 1740). L’itinéraire était : Luxembourg – Hesperange – Frisange – Thionville. En raison des attaques répétées par des brigands sur la dillience, les effectifs de la gendarmerie locale ont été renforcés en 1801. Ladite gendarmerie était opérationnelle à Frisange de 1797 à 1859 et s’accommodait d’une prison. Le relais postal et la gendarmerie ont été transférés à Bettembourg le 23 juillet 1859, suite à la création de la ligne de chemin de fer Luxembourg – Bettembourg – Thionville. Un nouveau relais postal était crée à Frisange le 1er décembre 1875 et transféré à Aspelt le 20 février 1882, suite à la mise en service de la ligne de chemin de fer Luxembourg – Mondorf – Remich.
En 1866 la dernière grande épidémie de choléra du pays demandait son dû dans notre commune. Les villages les plus touchés étaient Frisange et Hellange, où périssaient surtout des enfants.
Le chemin de fer arrivait dans la commune le 20 février 1882, jour de l’inauguration du train à voie étroite, communément appelé « Jhangeli ». Un des arrêts de la ligne Luxembourg – Mondorf – Remich était à Aspelt, « Op der Gare ». Le « Jhangeli » cessait ses services le 22 mai 1955. Une autre ligne à voie étroite de Aspelt à Bettembourg était inaugurée le 1ier septembre 1899 et restait en service jusqu’au 8 décembre 1952.
Le 2 août 1914, 4 jours après la déclaration de guerre de l’Autriche-Hongrie à la Serbie, des troupes allemandes occupent le territoire de Luxembourg. Bien que la région a été largement épargnée par la guerre, l’occupation impliquait pour la population rurale la confiscation des exploitations agricoles et la rationalisation des vivres à 240 g de farine et 300 g de pain par jour et par personne.
Un autre chapitre sinistre de l’histoire commençait le 10 mai 1940 avec l’invasion des troupes nazies. Frisange était alors placé sous intendance militaire. Durant ce périple, de nombreux habitants se cachaient ou s’exilaient afin d’échapper au joug nazi. 120 habitants de la commune ont ainsi trouvé refuge en Auvergne, à Saint Julien de Coppel. Le lien sympathique avec cette commune a été solennellement renouvelé par un jumelage célébré le 20 juin 2004.
L’évolution démographique illustre le rôle modéré qu’a joué Frisange dans l’histoire luxembourgeoise. Entre 1433 et 1656, à Frisange, le nombre de bâtisses ne dépassait jamais 10 maisons. En 1808 Frisange comptait 262, Hellange 210 et Aspelt 408 habitants. En 1920 la commune comptait 1312 habitants. Ce chiffre resta quasiment stable jusqu’en 1970, avec 1342 habitants. En 2005, la commune comptait 3348 habitants répartis sur presque 1400 logements.
Bibliographie :
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